Au n° 21 de l’avenue des Cavaliers, un banal chantier de réfection de façade. Changement de fenêtres pour plus isolantes. L’inévitable PVC blanc … Nettoyage sous chemise transparente. On conçoit que l’immeuble, qui a une quarantaine années d’âge, avait besoin d’être épousseté, après toutes ces années de bons et loyaux services sans trop d’encombres. Mais qui a donné le feu vert pour dégarnir le faux plafond en bois collé du portique pour le remplacer par des plaques plastifiées blanches (qui attendent encore d’être placées)? L’alliage béton/bois fait beaucoup du caractère de l’alignement brisé de l’avenue des Cavaliers, dont tous les numéros à ce jour se signalent par les remarquables huisseries des blocs d’entrée et le faux plafond avec effets d’avant-toits obliques du portique.
L’ensemble résidentiel de la Gradelle, prévu dans le mouvement des cités-satellites des années ’60, est incontestablement l’un des exemples les plus aboutis. Sur un site web consacré à la commune de Chêne-Bougeries on peut lire ce qui suit: « D’une modernité affirmée, l’ensemble de La Gradelle surgit dans les années 1960 sur un ancien terrain d’entraînement hippique. Cet ensemble de 906 appartements pour plus de 3000 habitants des architectes Jan Hentsch et Jacques Zbinden se veut être une unité de voisinage autonome avec des commerces, un restaurant, une église et un temple, une salle communale, et les écoles enfantine et primaire de la Gradelle. En 1963 les premiers appartements sont occupés. La construction de l’école de la Gradelle débute en 1964 et doit être agrandie quelques années plus tard. » (http://www.chene-bougeries.ch/decouvrir-hist-croissance)
Malgré son intérêt architectural indéniable La Gradelle n’avait pas trouvé grâce aux yeux de Mark Müller, précédent conseiller d’Etat au DTPE, qui avait donné pour consigne d' »oublier » l’ensemble. Pas digne de protection particulière, pas nécessaire de l’inscrire sur quelque liste que ce fût, foin de la mise à l’inventaire, le classement? quelle idée …. Pourtant Le Lignon, honni si longtemps, vient de recevoir sa juste reconnaissance! Mais revenons à La Gradelle, tant et si bien oubliée qu’elle perd chaque jour un peu de ce qui a fait ses qualités d’origine. Des détails changent. Des mises en couleurs discutables customisent et procurent la touche contemporaine. Les matériaux sont progressivement remplacés … tant et si bien que c’est tout le dess(e)in architectural d’origine qui en est contrarié.
L’alignement brisé de l’avenue des Cavaliers était à ce jour encore relativement intact, quand bien même certaines magnifiques portes d’entrées ont été renforcées par des systèmes, Sécurité oblige, qui font prothèses orthopédiques. Des luminaires basse consommation d’énergie ont eu raison des magnifiques cache-néons biseautés (pieusement récupérés par mes bons soins), et s’allument derrière un cache grillagé du dernier quelconque. etc. etc.
La CMNS (Commission des Monuments et des Sites) n’ayant pas pour mission de veiller aux travaux effectués sur ce site « oublié », c’est à la CA (Commission d’architecture) qu’il revient de se prononcer. Un dossier en autorisation a-t-il été déposé pour les travaux en cours au n° 21 de l’avenue des Cavaliers? Telle est la question que tout le monde se pose. Au coeur du mois d’août difficile de vérifier. Quelques membres de la CA disent n’avoir rien vu passer.
Quelle raison pour dicter ce remplacement? L’économie de la solution de remplacement en dépit de l’esthétique de l’ensemble? Pire, une concertation de tous les régisseurs et propriétaires pour remplacer le chaleureux faux plafond de bois sur toute la longeur du portique? Se pourrait-il tout de même que les faux plafonds de bois, enlevés sans ménagement au son strident de la visseuse électrique (il y avait des débris de bois partout après le carnage) soient partis à la réparation pour 40 nouvelles années de bons et loyaux services. C’est ce que se demandent votre servante et son voisinage.