Entretien et maintenance: « quand deux ou trois Curés se sont succédés »

Jean-Pierre Guillebaud (1805-1888) fut un architecte important de la Genève du XIXe siècle. Auteur de nombreux temples et églises, il fut notamment architecte de la Société économique en charge de l’entretien de bâtiments scolaires et de culte. A ce titre il fut amené à réparer, voire restaurer un certain nombre d’édifices. Les considérations générales qu’il formula à l’occasion de l’intervention qu’il fut amené à faire sur l’église du Grand-Saconnex à la fin des années 1830 sont riches d’enseignement!
« Une église est une propriété publique; la commune paie 1/3 de la dépense pour sa construction et paye l’entretien parce qu’elle en fait particulièrement l’usage. L’église n’est donc point donnée à la commune, mais lui est confiée pour son usage par le Gouvernement ou Administration spéciale à ce commis, doivent veiller à ce que le Monument, cette propriété publique, soit respectée par tout le monde, par la Commune et son Conseil et par le Curé; et à ce qu’elle soit bien entretenue.
J’ai remarqué, au contraire, avec un vif regret, que les monuments, une fois terminés ou réparés, étaient entièrement aux Communes et Curés, qui, par leur manque de goût, par négligence et leur ignorance, les dénaturent, les laissent même aliéner ou travaillent pour ainsi dire à leur préparer une ruine prématuré […] Il est évident que quand deux, trois Curés se sont succédés dans une église et y ont fait leur fantaisie, assistés d’un Conseil de fabrique et d’un Conseil de Commune, on obtiendra toujours des résultats semblables à ceux que j’ai l’honneur de vous décrire et signaler […]
Le seul moyen d’y remédier est: Quand il se fait un monument, d’en dresser l’état des lieux très précis et détaillé. De faire faire régulièrement une ou deux visites par année pour constater l’état intact de conservation et d’entretien, et en livrant les monuments aux Communes et autres Administrations, leur faire faire la reconnaissance détaillée du tout et défendre d’y faire aucun changement, nouvelle oeuvre ou décoration non mobile, sans une autorisation spéciale de la Chambre des Travaux publics. »

Munis aujourd’hui de nos instances de contrôle que sont la Direction du Patrimoine et sa Commission des Monuments et des Sites ou les associations de protection du patrimoine, sommes-nous pour autant sortis des problèmes d’entretien des bâtiments publics et du phénomène de toute-puissance de certains usagers? Les chutes de corniche ici et l’incurie qui frise l’indécence là apportent toujours de l’eau au moulin de Jean-Pierre Guillebaud!

 

 

 

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