Pr. Dr. Leïla el-Wakil, Université de Genève (version auteure de l’article publié dans Le Courrier de l’Unesco, janvier-mars 2024, sous le titre « Le retour en grâce du vernaculaire »
A l’heure où chacun peut désormais constater les effets du changement climatique sous toutes les latitudes, la question de l’impact carbone du secteur du bâtiment et des infrastructures est devenue cruciale. Et si, confiants dans nos moyens high-tech, nous avions été des apprentis sorciers dans notre manière d’aménager la Terre ? Et si, pareils aux constructeurs arrogants de l’Ancien Testament, nous avions défié Dieu en édifiant des tours de Babel qui aujourd’hui renversent l’humanité ? Les risques actuels sont liés à la subsidence (Djakarta et quelques autres mégapoles s’enfoncent sous le poids de leurs gratte-ciel), à l’imperméabilisation des sols, aux ilots de chaleur urbains, à la surexploitation du sable des littoraux pour fabriquer le béton, cette « arme de construction massive du capitalisme » selon Anselm Jappe. Quel regard porter dès lors sur les hauts faits architecturaux du XXe siècle et comment réorienter l’architecture pour répondre à la question cruciale de la durabilité et de l’impact CO2 qu’il s’agit de maîtriser ?
Alternative : la grotte ou la hutte ?
Obligés de trouver des moyens primordiaux, à l’instar des animaux, pour s’abriter sous toutes les latitudes et climats, les êtres humains ont déployé une créativité quasi instinctive pour se protéger. La théorie architecturale occidentale, de Vitruve à Joseph Rykwert, reconnaît essentiellement deux réponses adéquates à ce besoin essentiel, possibles origines de toute architecture savante : la grotte d’une part et la « hutte primitive » d’autre part.
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